Jean-Michel Deiss est pour moi l'archétype du vieux sage doublé d'un charisme captivant. Je l'aurai bien vu maître de conférence ou comme le professeur d'université idéal qui sait intéresser son public par la teneur de propos intéressants.
A la tête du domaine Marcel Deiss dont la réputation n'est ni usurpée, ni à présenter (le dernier numéro 544/Septembre 2010 de la RVF lui dédie un article que je vous invite à lire), Jean-Michel qui est aussi président des Grands Crus d'Alsace, me fait penser à un chevalier croisé.
J'ai eu l'occasion de le rencontrer lors du salon de la RVF et son humanité et ses sens des valeurs m'avait frappé. Plus encore, sa capacité à me captiver et à toucher ma corde sensible via l'emploi de descripteurs et de mots pertinents m'a complètement séduit.
C'est vraiment le genre de "professeur" qui vous inculque de l'apprentissage et qui vous donne l'envie de poursuivre dans ce beau monde des vins & spiritueux.
J'ai eu tellement de respect pour Jean-Michel Deiss que je n'ai pas osé le prendre en photo malgré mes gênes asiatiques de tireur de portraits.
Sa conviction de la biodynamie est un modèle de perfection pour les croyants de cette culture et s'inscrit pleinement dans l'identité de Vinosensia.
Ma visite de la région viticole alsacienne était donc une étape indispensable pour visiter le domaine Marcel Deiss et prolonger mon expérience de la dégustation des bijoux crées par le travail et la réflexion de Jean-Michel Deiss et Marie-Hélène Cristofaro (oenologue).
Notre visite coïncidait avec la période excitante des inventaires (comptage des bouteilles à la mano svp) supervisés par le maître en personne.
Nous avons donc échangé pendant quelques minutes avec Marie-Hélène qui nous a ensuite laissé aux mains du conseiller caviste du domaine. Nous avons eu l'honneur d'être ensuite salué par Jean-Michel qui nous a présenté un court exposé sur la nécessité de sauvegarder le patrimoine viticole alsacien et surtout sur la protection de ses terroirs. Fort de ces données qui vont m'enrichir, nous attaquons la dégustation suivante concentré principalement sur la gamme dite des "Vins de terroirs" (Premiers et Grands Crus) :
- Burlenberg 2005,
- Riesling 2008,
- Engelgarten 2007,
- Langenberg 2007,
- Rotenberg 2007,
- Schoffweg 2004,
- Gruenspiel 2007,
- Altenberg de Bergheim 2002,
- Altenberg de Bergheim 2007,
- Mambourg 2006.
Rien que le fait d'évoquer ces merveilleux terroirs alsaciens me fait saliver et me donne l'envie de faire partager ces bijoux avec mes proches...
Que vous raconter si ce n'est vous dire que les vins du domaine Marcel Deiss; qu'ils soient issus de la gamme des "Vins de Fruits", ou des "Vins de Terroirs", ou encore des "Vins de Temps"; sont à mes yeux des oeuvre d'art qui nous transportent au coeur d'une civilisation et d'une terre riche de diversité et de complexité.
Ces vins ne s'appréhendent pas pour ceux qui seraient trop impatients et qui manqueraient d'écoute. Pour retirer une expérience émotionnelle unique, il faut sincèrement aimer le travail de précision et avoir un bon guide pour ne pas se perdre au sein de la myriade d'arômes qui voyagent à l'extérieur du verre.
L'intensité est plus que surprenante... La signature du terroir et de la philosophie du domaine Marcel Deiss est confirmée après chaque gorgée de dégustation.
Mes sens sont en ébullition, le plaisir de la découverte et le ressenti intérieur est tellement puissant que je virevolte dans les airs de façon inconsciente. J'ai la sensation que le terroir me possède et envahit chaque veine de mon corps.
Si je devais m'étendre sur 3 vins sans vous assommer avec un commentaire qui se veut personnel, je choisirai le Burlenberg, le Rotenberg et l'Altenberg de Bergheim (mais le Mambourg mériterait un article à part de par sa haute qualité).
Ils sont de merveilleux ambassadeurs de la notion de terroir.
Le Burlenberg (issu de terroirs volcaniques) est certainement l'un des vins les plus représentatifs de son nom et des plus surprenants.
Le nez est si puissant que l'intensité qui s'en échappe m'a fait pensé à une cheminée d'un volcan en éruption : des notes de feu de bois et de cendres, un caractère "smoky" bien trempé allié à des arômes de fruits noirs (cassis et mûre pour ma part) cuits presque brûlés. On ressent la densité de la peau des raisins et on y associe immédiatement un athlète en plein effort musculaire. J'y ai senti aussi un côté terre brulée aride mais humide et une finale de céréales torréfiées avec une persistance qui possède le dégustateur.
Le Rotenberg offrait un nez aérien, que j'ai trouvé tout en finesse et en sensualité. Des épices douces planait au dessus d'un voile légèrement mielleux rappelant la générosité des fruits blancs (pomme et poire). C'est un vin qui se veut dynamique et qui insuffle une énergie positive.
Je me sens courir un soir de printemps accompagné par un coucher de soleil. La minéralité s'exprime de manière intense sur la finale.
L'Altenberg de Bergheim possède un micro-climat propice à la surmaturité des raisins voire à la présence de la pourriture noble dû à son exposition plein sud.
Ce grand cru est une merveille et le millésime 2002 que nous avons dégusté offrait un nez d'évolution où les notes de pétrole se mêlaient aux notes de botrytis. L'abricot sec explose au nez avec des notes d'agrumes confits.
Un magnifique équilibre entre sucre et acidité conduisant sur une longueur à n'en plus finir eurent raison de ma conscience.
Comme vous l'aurez dénoté, je ne cite en aucun cas la mention de cépage car les grands vins du domaine Marcel Deiss ont pour désir de s'affranchir du côté variétal des vins et s'attachent davantage à représenter et transcrire la nature des sols.
Pour Vinosensia, il ne fait aucun doute que les vins de ce domaine méritent d'être découverts et appréciés par tout amateur de vin. Bonne dégustation.